Une nouvelle journée commençait à Chicago et Kateryna tenait à ce que ça soit une journée comme une autre. Malgré le serrurier dans son entrée, la blonde voulait garder ses habitudes, son quotidien comme si rien ne s’était passé. La visite de son appartement par son stalker avait quelque peu secouée la jeune femme ainsi que son entourage. Elle fit appel à un professionnel afin de sécuriser davantage sa porte d’entrée. Sa maman lui proposa de déménager, trouver un autre endroit pour qu’on ne la retrouve pas mais Kateryna ne souhaitait pas quitter son appartement, elle adorait cet endroit. Et de toute façon, s’il avait réussi à trouver son adresse, il trouverait la suivante également. Elle n’allait pas déménager tous les six mois pour échapper un détraqué. Après tout, il n’avait pris que quelques babioles sans valeur, simple trophée arraché aux mains de son idole. Kateryna avait le choix de la raison et de la mesure. Elle répétait à qui voulait l’entendre qu’il n’y avait pas lieu de s’inquiéter. Elle décida d’ailleurs de ne pas en parler sur ses réseaux sociaux, pas la peine d’inciter de nouveaux fans à faire n’importe quoi ou d’affoler le reste de sa communauté.

C’est dans cet état d’esprit serein que Kateryna reçu un appel de Betty, son agent depuis plusieurs années maintenant “Coucou, tu vas bien ?” demanda directement la femme au bout du fil. La blonde la rassura, elle allait bien, comme la veille et le jour d’encore avant. Betty lui demanda de passer à l’agence dans la matinée, elle avait quelque chose d’important à lui dire. Kateryna connaissait très bien Betty - à force de travailler ensemble, ça en était devenue quasiment une amie. Elle sentait dans sa voix qu’il n’y avait rien de grave mais que c’était tout de même important.

Dès que le serrurier termina son travail, Kateryna quitta son appartement et prit le chemin de l’agence. Kateryna et Betty s’étaient rencontrées il y a presque dix ans, quand Kateryna avait été élue Miss USA. Avoir un agent artistique allait être indispensable afin de pérenniser sa carrière et Betty avait proposé de la représenter. Leur partenariat fut très fructueux pour chacune des parties. La blonde avait encore de temps en temps des propositions pour changer d’agence, elle refusait systématiquement toute demande. Betty restera son agent. En une dizaine de minutes à pied, Kateryna arriva sur place, saluant rapidement la réceptionniste. Bien qu’elle n’ait pas rendez-vous, la jeune femme entra directement dans le bureau de son amie.

Après les salutations d’usage, Betty entra dans le vif du sujet. Après ce qu’il s’était passé, l’agent craignait pour la sécurité de Kateryna. Elle avait donc pris une décision qui ne lui ferait pas plaisir, elle avait engagé un garde du corps. La blonde souffla de désarroi, répétant sans cesse qu’elle allait bien et qu’elle n’avait pas besoin de lui. Le ton commençait doucement à monter, chacune campait à sa position, quand le téléphone de Betty sonna. C’était l’accueil, il était arrivé, les présentations allaient se faire. Kateryna jura en suédois, incapable de croire que cette histoire prenne de telles proportions.

Kateryna n’arrivait pas à croire qu’elle ait encore et toujours cette discussion depuis plusieurs jours. Pourquoi tout le monde en faisait tout un fromage pour cette histoire ? Elle pouvait paraître naïve mais elle avait fait le choix de ne pas céder à la peur et à la paranoïa. Pas comme Betty. A peine cette dernière avait annoncé que son garde du corps était arrivé que Kateryna se ferma comme une huître. Véritable enfant prête à faire un caprice. Ne pas céder, ne pas céder se martelait elle en boucle. Il n’y avait pas moyen qu’elle cède “Betty, c’est débile, tu deviens parano, il va servir à rien” Et pourtant quand la porte s’ouvrit, le visage de son interlocutrice s’illumina. Elle était ravie - si ce n’est rassurée - de voir enfin qui elle avait engagée. Kateryna se doutait que son agent avait dû jouer de ses connaissances dans le milieu, trouver une agence de sécurité fiable avec un homme de dispo de suite. Mais dans la tête de la blonde, il n’y avait que les témoins dans les grandes affaires criminelles qui avaient besoin d’un garde du corps ou des criminels eux même. Pas une présentatrice télé. Il y avait bien longtemps que Kateryna n’avait plus besoin de baby sitter.

La blonde croisa les bras sous sa poitrine, absolument pas en posture pour accueillir ouvertement sa nouvelle ombre. Clairement, elle trouvait ce processus bien plus intrusif que l’effraction qu’elle avait eu quelques jours plus tôt. Elle prit le temps de jauger un peu cet homme. Une tignasse fournie, des tatouages recouvrant ses deux bras et un peu son torse ce que son T-shirt laissait transparaître et une belle barbe entretenue. Il avait quand même bien plus le look d’un bûcheron canadien que d’un garde du corps. Il ne ressemblait en rien au mec bodybuildé de la salle de sport du coin. Dans d’autres circonstances, Kateryna était sûre qu’elle aurait apprécié le jeune homme. Mais là, pas aujourd’hui, pas comme ça.

Et quand elle est contrariée, le côté froid et distant de la blonde n’est jamais très loin. Quand il se présenta et lui tendit la main, elle se sentit obligée de devoir répondre à cette présentation. Par le strict minimum. “Bonjour” répondit t’elle froidement, en serrant à peine la main de son garde du corps. Rien que ce mot, c’était ridicule. Toute cette situation était ridicule. Kateryna se tourna vers son agent, ignorant totalement la présence de Joachim pendant un instant “Non vraiment Betty ça va pas le faire. Renvoie ce gus d’où il vient, j’ai pas besoin de lui.” Un rapide regard vers le concerné “Sans vouloir vous offenser” Petit sourire narquois, forcé sans même pouvoir le cacher. C’était pour la forme évidemment, politesse oblige. Mais le fond reste inchangé. Elle ne voulait pas de lui. Ni d’un autre.