( Night is young and the music's high )
Sa première représentation à Chicago. Wendy s’était durement entrainée, peut-être un peu trop, elle ne voulait rien de moins que la perfection. Elle avait usé le parquet ciré de la salle d’entrainement de l’école, elle et toutes les recrues. L’émulsion avait soudé cette toute nouvelle promotion, tous venu d’un peu partout des états unis et d’ailleurs, déracinés et qui seraient bientôt mis en concurrence. Même dans sa chambre, en s’assurant de ne pas déranger ses hôtes, elle continuait à parfaire ses mouvements, s’autorisant une fois à leur demander conseil. Wendy avait relevé le défi haut la main, chorégraphie maitrisée, les œuvres de Pina Bausch ne laissaient pas de place à l’imprécision et elle avait livré une performance de qualité. C’était une tradition pour les nouveaux arrivés de l’école, une première représentation rapide afin de présenter les nouvelles recrues aux mécènes. Baptême du feu. Première sélection qui n’en portait pas le nom.
Wendy ressentait une immense fierté et lors des salutations elle rayonnait. Dans le public, elle croisa les regards de Luca et Guiliana, elle les avait invités sans trop y réfléchir, impulsion, peut être un peu avide d’avoir leur avis, à eux, bien plus expérimentés qu’elle. Et puis, bien qu’elle ne les connaisse pas vraiment, ils étaient les seuls visages familiers ici. Elle leur adressa un signe, avant de reprendre la main des autres pour un dernier salut. Le départ fut bondissant, virevoltant et dans les vestiaires régnait l’euphorie maintenant que tout le stress était retombé. Ils auraient le débrief demain, ce soir, ils pouvaient profiter.
L’école avait négocié des entrées pour une boîte à la mode, alors chacun dans son sac de sport avait préparé une tenue de circonstances. Wendy adorait sortir, elle adorait s’apprêter, les boîtes de nuit, cela lui rappelait LA, les sorties avec sa troupe avant que tout ne dégénère. Mais il n’y avait pas de place chez elle pour la nostalgie, fer à boucler dans une main, de l’autre elle collait soigneusement de petits stickers brillants sur sa pommette. Elle échangeait avec ses comparses, plaisanterie, paillettes, épingles et maquillage au gré des envie. Ils sortirent par petits groupes. Mini short, bustier court et veste pailletée, Wendy était prête à danser toute la nuit sur un rythme beaucoup plus endiablé. Elle s’arrêta un instant dans le hall en croisant ses hôtes «
Merci d’être venus ! » Sa joie et sa reconnaissance étaient sincères.
Elle n’avait que peu échanger avec eux, mais elle les appréciait. «
On va… » elle réalisa qu’elle avait oublié le nom de la boîte mais une comparse vola à son aide «
voilà, là-bas… venez avec nous ! » Proposa-t-elle spontanément avec une joie naïve. Elle réalisera plus tard que c’était peut-être un peu déplacé, mais l’adrénaline l’empêchait de le constater à cet instant et puis ils n’avaient pas tellement d’écart d’âge et ne ressemblaient vraiment pas à ces trentenaires pantouflards. Elle aurait voulu leur demander leur avis sur sa prestation, mais ses nouveaux amis piaillaient d'impatience.
La boîte était bondée, la musique résonnait jusque dans sa cage thoracique et elle n’attendit pas une seconde pour entrainer ses nouveaux amis sur la piste. La courte veste à frange pailleté voletant autour d’elle à mesure de ses sauts et ses mèches blondes rebondissant autour de son visage. L’énergie canalisée par l’exigence de l’école, se libérait ici, elle dansait en sachant qu’elle était regardée, séduction radieuse, un peu tapageuse sans doute mais qui touchait toute la petite promo. Débauche de déhanchés saccadés, d’ondulation et de rire. Ils étaient beaux, tous à danser sans contrainte, chacun rivalisant de ses meilleurs mouvements, tant et si bien qu’on leur laissa un peu d’espace et qu’une table VIP offrit quelques bouteilles de champagne. Leur groupe leur conférait une invulnérabilité, ils étaient irrésistibles, ils le ressentaient ainsi en tout cas.
Wendy s’éclipsa un instant, rapportant deux coupes avec elle, elle avait repéré Luca et Guiliana et voulaient qu’ils profitent eux aussi du bienfaiteur «
Vous ne venez pas danser ? » demanda t-elle vivement sourire accroché aux lèvres, regard un peu plus brillant, s’immisçant dans leur conversation avec une gêne émoussée par le champagne, en leur tendant les coupes.