Il était tard et Aaron n'était pas bien. Il doutait toujours autant de lui, de son avenir qui de toute façon était tracé. Il ne ferait jamais autre chose. Et il doutait, Aaron. Il doutait un peu trop. 18 ans et le coeur serré. Il ne serait plus jamais comme les autres, par sa faute. Et il avait besoin d'un peu de réconfort. Il était majeur après tout maintenant. Mais il avait besoin d'aller voir quelqu'un de neutre et cette personne, c'était Jane. Sans lui dire ce qu'il était devenu, il irait la voir comme pour lui montrer que tout allait bien. Faire semblant, le temps d'une soirée. Redevenir Aaron Casteel. Parce que parfois, Aaron se reconnaissait plus.

Il profita du peu de répit pour aller à son club. Il le connaissait bien, il y allait plus jeune, pour échapper à l'indifférence de son père. Il savait bien qu'il n'avait pas l'âge mais il avait trouvé en Jane, un substitut de mère et c'était pour ça qu'il y retournait ce soir. Pour avoir un peu d'attention qui soit différente de celle qu'il avait actuellement. Il réussit à se glisser jusque dans le club et il chercha Jane des yeux. Lorsqu'il la trouva, il alla vers elle. Il y avait du monde, on le repérerait pas, du moins, pas par les Casteel. Il arriva devant elle et il la salua.

- Salut, tu as un peu de temps ce soir?

Jane, femme d'affaires débordée mais qui prenait toujours le temps d'aller saluer ses connaissances. Se montrer, se pavaner sans doute aussi un peu, faire de nouvelles connaissances et entretenir les anciennes. Le tout était important et Jane le savait bien.
Elle était sur le point de prendre congés d'un de ses clients lorsqu'elle se fit alpaguer par... Aaron ! "Hey ! Salut toi !" Elle était visiblement ravie de le voir et le serra même dans ses bras avant de lui poser un bisou sur le front. "Tu sais bien que pour toi, j'ai toujours du temps chouchou. Viens, on va dans mon bureau."
Chouchou, petit surnom affectueux qu'elle lui avait donné il y a de cela des années. Jane n'a jamais eu d'enfants. Elle ne rêve pas particulièrement d'en avoir. Et c'est peut-être la raison de son attachement envers Aaron.

Elle les conduisit tous les deux jusqu'à son bureau donc. Bureau très spacieux avec à l'intérieur, évidemment, un large bureau mais également deux canapés se faisant face et des fauteuils. Un mini-bar siégeant également au fond, non loin des canapés. Elle entra en premier et l'invita à prendre place sur un des canapés. "Tu veux boire quelque chose ?" lui demanda-t-elle en se dirigeant vers le mini-bar. Mais elle sentait que quelque chose n'allait pas alors elle laissa tomber les boissons pour le moment et prit place près de lui. "Qu'est-ce qui se passe chouchou ? Ca va pas ?" Il savait qu'il pouvait tout lui dire. Substitut de mère pour lui, certes, même si elle se doutait bien qu'il n'aurait certainement pas tout dit à sa propre mère. Bref. En attendant, elle était là. Prête à l'écouter, à le soutenir. Comme elle l'avait toujours fait.

Aaron se sentit soudainement en sécurité. Au moins ici, les démons qui le tourmentaient ne pouvait plus l'atteindre. Il ne pourrait pas tout lui dire mais il pourrait trouver du réconfort par rapport à sa fugue. Au moins, il y avait une personne qui était ravi de le voir. Il se força à sourire en la voyant. Elle agissait comme une mère et pour Aaron, c'était comme s'il passait du temps avec sa mère. Sa culpabilité s'envolait provisoirement. Il finit par la suivre à son bureau .

Aaron fut content d'être dans un lieu moins bruyant et il s'assit sur le canapé. Ses pensées se bousculaient et se mélangeaient dans sa tête. Elle s'assit près de lui et lui demanda de parler. Aaron soupira et il se lança:

- Tu sais que je suis parti de la maison à cause de papa... Et là, je suis sûr qu'il doit être content de plus me voir, un en moins à s'occuper, il doit être aux anges..

La colère qu'il gardait en lui, menaçait d'exploser mais il préférait la garder pour son père si un jour, il le recroisait.

- Depuis, je me sens coupable mais je rentrerais jamais à la maison. Mais je me sens coupable parce que je pense que j'aurais du partir bien plus tôt.. 

Alors qu'il commença à parler, Jane fit une légère moue et prit sa main entre les deux siennes. "Oui je sais chouchou et tu sais ce que je pense de tout ça..." Jane comprenait sa détresse, peut-être mieux que quiconque autour de lui mais elle lui avait dit que ce n'était certainement pas le meilleur des choix à faire. Elle n'avait rien dit à son père. Elle ne le connaissait que trop bien et préférait que Aaron comprenne tout seul l'erreur qu'il commettait. Cela prendrait certainement du temps. Quand on a 18 ans, on ne percute pas de la même façon qu'à 30.
En tout cas, elle le couvrait et le protégeait du mieux qu'elle pouvait. Elle lui avait même proposé de l'héberger mais Aaron avait refusé en lui disant qu'il avait un logement. Elle lui faisait confiance, à moitié. En vérité, elle savait très bien ce qu'il faisait et où il dormait. Et ça, clairement, elle ne le cautionnait pas du tout. Mais elle ne lui en parlait pas. Elle voulait que cette révélation vienne de lui. Elle ne voulait pas qu'il croit qu'il n'avait aucune liberté.

"Ne crois pas ça. Ton père m'appelle régulièrement pour savoir si j'ai de tes nouvelles et comment tu vas. Je lui ai pas caché que je te voyais et je le rassure du mieux que je peux. Il s'en veut tu sais..." Il s'en veut de les avoir abandonnés tant d'années. Il s'en veut de les avoir délaissés à la mort de son épouse. Mais Aaron ne veut rien entendre. Et Jane, elle, tente de lui expliquer et de le faire revenir à la raison. Ce n'est pas une chose aisée ! C'est qu'il est têtu le petit chouchou !