Le vase en cristal s’écrase en mille morceaux sur le carrelage de l’entrée. Il faut perfectionner la scène pour plus de réalisme. Eleanor récupère un éclat et sans sourciller, elle entaille son bras gauche sur quelques centimètres. Rien de tout ce qu’elle peut s’infliger maintenant ne pourra égaler la douleur de ses jeunes années. Alors s’il faut en passer par là pour mener à bien sa quête de justice, elle ne reculera devant rien. Même si ça implique de mutiler son corps meurtri. Meurtri de manière invisible pour la plupart de ses blessures passées que le temps a effacé. Mais elle garde tout de même la trace de la fin de son cauchemar grâce à cette cicatrice sur son ventre. Auto-infligée pour se libérer. Tandis qu’elle laisse une goutte de sang perler de l’entaille, elle arrache un morceau de tissu sur le bas de sa robe. Cheveux en bataille, comme si on avait tiré dessus. Avec un peu d’eau, elle fait couler son mascara sur ses joues jusqu’alors immaculées. Elle peut maintenant attraper son téléphone.
Eleanor compose le numéro de Kaylee, cette jeune femme rencontrée quelques jours plus tôt. Un véritable potentiel pour rejoindre ses harpies cette nana. Avec ce franc-parler. Avec cette appétence toute particulière pour les femmes. Avec ce corps dessiné. Ces trois caractéristiques, Eleanor a eu l’occasion de les découvrir – et pour les deux dernières de les apprécier – le temps d’une nuit passée en la compagnie de cette femme, de quelques années sa cadette. Avant son mariage, la harpie n’avait jamais eu de relation homosexuelle. Elle suivait un chemin comme déjà tracé à l’avance. Le petit-ami, qui devient l’amant, qui devient le concubin, qui devient le mari, qui devient le bourreau. Comme un électrochoc après la mort de son tortionnaire, elle s’est mise à apprécier la compagnie des femmes. Les femmes fragiles qu’elle peut manipuler à sa convenance, les femmes fortes qu’elle peut utiliser comme armes de destruction massive. Et elle a comme l’intuition que Kaylee pourrait faire partie de cette deuxième catégorie. Mais toute son organisation criminelle repose sur le fait qu’elle se doit de rester discrète sur ses activités. Personne ne doit tout apprendre au détour d’une conversation. C’est beaucoup trop dangereux. Mais alors comment savoir ? Comment dénicher les perles qui sont capables et dignes de rejoindre ses rangs ? En leur faisant passer un casting bien particulier, une orchestration sortie tout droit d’un cerveau tordu. Mais si Kaylee passe cette première étape, si elle réagit comme espéré, la comédie pourra se poursuivre. Première sonnerie, deuxième. Quand Kaylee décroche, Eleanor ne reconnaît même pas sa propre voix, déformée par la panique surjouée.
« Kaylee. Je... » Elle réprime un faux sanglot. Actrice studio. « Je suis désolée... Je ne sais pas pourquoi je t’appelle... Je viens de rentrer chez moi, j’étais suivie… Tout s’est passé si vite. Je crois que j’ai réussi à le faire fuir mais peut-être qu’il est toujours là… Je ne veux pas rester seule… Tu te souviens de mon adresse ? » Le discours un peu confus de la demoiselle en détresse. Mais elle s’est promis de ne plus jamais être la victime. Une fois le téléphone raccroché et le piège tendu, Eleanor relève la tête et croise son reflet dans le miroir du salon. Aucune culpabilité ne se lit sur son visage. Comme à son habitude, la blonde reste calme. Une tranquillité malsaine. Quand Kaylee arrive, Eleanor a le visage transformé. Une expression choquée sur le visage, la porte de l’appartement entre-ouverte. Elle est prostrée dans un coin de la pièce principale. Son cerveau bouillonne mais à l’extérieur, on pourrait vraiment penser qu’elle vient de subir une agression tant elle est stoïque et paralysée.
Encore une journée passé devant des chiffres et des courbes. Son boulot, elle peut le faire de chez elle, mais ça ne veut pas dire qu'elle se fatigue moins que d'autres qui vont dans un bureau. Rester sur place à regarder un écran, elle n'aurait jamais imaginé avoir un boulot comme ça un jour et pourtant. Enfin, il faut avouer qu'elle ne reste jamais bien longtemps devant son écran. Sans cesse debout, elle va à droite à gauche chez elle. Elle a des alertes sonores pour chaque Trades en cours. Des alertes qui la prévienne quand les courbes baissent ou montent, qu'elles dépassent un certain stade. Bref, ça lui permet de pouvoir décrocher un peu les yeux de ses écrans. Notamment pour faire une séance de sport. Elle qui avait un métier physique avant, elle met un point d'honneur à garder la forme.
Kaylee est affalé dans son canapé quand son téléphone sonne. Les soirs où elle ne sort pas, elle se couche tôt mais s'endort tard. L'insomnie, une maladie qui la ronge depuis sa première opération en territoire lointain. Alors elle s'allonge et regarde des séries, des films, des vidéos jusqu'à ce que le sommeil la frappe. La jeune femme met son ordi de coté et attrape son téléphone sur la table basse. Eleanor. Ce ne fait que quelques jours qu'elle connaît cette personne. Une rencontre en soirée qui a débouché sur une nuit fort sympathique et un échange de numéro. Oui, Kaylee est ce genre de personne qui a des relations d'un soir, mais elle n'est pas du genre à partir comme une voleuse le matin. Même si c'est convenue avec la personne qu'il n'y aura surement rien de plus, ça n'empêche pas de lui offrir le petit déjeuner avant de partir. Non, ce n'est pas du romantisme, juste du savoir-vivre! Elle est parfois un peu lourde et un peu cash, mais elle est bien élevée. C'est assez intrigué tout de même qu'elle décroche son téléphone.
Yep. Dit-elle pour faire comprendre qu'elle est bien de l'autre côté de l'appel. Elle entend son prénom suivi d'un sanglot étouffé. Kaylee se redresse directement de son canapé. - Eleanor? Ça va? La femme au bout du fil lui explique la raison de son appel. Elle semble affolée, sa voix n'est pas claire, même si son message l'est.
-T'inquiète pas j'arrive. Essaye de te mettre dans une pièce que tu peux fermer et où il y a une fenêtre si t'a peur qu'il soit encore là. J'suis là dans quelques minutes.
S'enfermer dans une pièce avec une seule issue, c'est toujours une mauvaise idée. Dans la panique, ce n'est pas dit qu'elle est le courage de changer l'endroit où elle est. Les gens ont tendance à juste se mettre en boule dans un coin en espérant que ça passe. Elle a déjà eu le réflexe d'appeler quelqu'un c'est bien. Kaylee prend le temps de sauter dans le premier pantalon qui lui tombe sous la main. Elle ouvre un coffre-fort dans sa chambre pour y prendre un bâton télescopique. Kaylee regarde son flingue, hésite un moment, et finit par le prendre avec son holster d'épaule et une veste légère. Oui, elle ne va pas mettre un flingue dans son pantalon comme une racaille. Si elle le prend, elle le camoufle et ne s'en servir vraiment qu'en dernier recours. La blonde ouvre un autre coffre prés de sa porte d'entrée pour prendre la clef d'une de ses voitures. Une des plus rapides pour ne pas perdre de temps. Bon, on ne passe pas inaperçue avec une Mercedes SLS AMG, mais c'est pas grave. C'est rapidement que la blonde sort la voiture de son garage fermé pour tracer la route vers l'appartement d'Eleanor. Par chance, elle trouve une place libre non loin de la porte. Si ça n'avait pas été le cas, elle n'aurait pas perdu de temps à tourner pour trouver une place, elle se serait posée quelque part au plus près. C'est en courant qu'elle parcourt la distance qui la sépare encore de la porte d'entrée de chez la demoiselle. La porte entre ouverte, Kaylee marque un temps d'arrêt pour prendre le temps d'écouter s'il y a encore de l'agitation ou non à l'intérieur. Aucun bruit. Son bâton encore plié dans sa main, elle pousse alors la porte d'un coup en regardant dans toutes les directions pour s'assurer qu'il n'y est personne de dangereux. Personne à part Eleanor qu'elle aperçoit après être entré. Des débris par terre, Kaylee semble les avoir vite repéré car elle ne marche pas dessus, enfin le moins possible en tout cas. Elle ferme doucement la porte derrière elle et s'approche de la femme prostrée dans un coin.
Kaylee se baisse doucement. Elle essaie d'avoir l'air le plus rassurant possible en regardant l'autre femme. Ce genre de situation, elle l'a connue en Irak. Des terroristes qui parfois s'infiltrer dans des maisons pour s'y cacher, laissant derrière eux des femmes et des enfants terrifiés. Seule femme de son groupe, Kaylee était souvent celle qui s'approcher des victimes pour s'assurer qu'elles n'étaient pas blessées et pour tenter d'avoir des informations avant de procéder à la fouille des lieux avec ses collègues.
- Eleanor, ça va? Tu crois qu'il est toujours là? Il était armé?
Kaylee parle avec une voix très calme, sur un ton assez bas pour l'apaiser le plus possible. Même si elle s'approche d'elle, elle ne la touche pas directement. Les victimes d'agressions supportent très peu le contact physique directement après leur mésaventure. Rapidement Kaylee remarque la blessure d'Eleanor. Le sang qui s'en échappe ne coule pas vraiment abondamment, à première vue ça semble être une blessure assez superficielle. Assez pour faire mal, assez pour impressionner ceux qui n'ont pas l'habitude. Mais vu son métier, la blesser doit déjà savoir que ce n'est pas ben grave.
- J'ai vu personne dehors, si tu l'as pas vu sortir, si t'a un doute. Je vais faire un tour pour être sûr que la zone est sécurisée, d'accord?
Vu son état, il ne serait pas étonnant qu'elle ait un doute. Kaylee n'aime pas laisser une victime seule pendant qu'elle sécurise une zone, mais là elle n'a pas trop le choix. Comme lors d'un accident, il faut sécuriser la zone avant de porter secours, surtout dans ce genre de cas ou la victime n'est pas gravement blessée. Il serait bête, qu'elle se concentre sur Eleanor alors que le gars est encore là. Si elle peut lui dégommer les jambes et les bras pour être sûr qu'il ne fasse plus de mal à personne au lieu de se faire agresser, elle préfère. Sur ce, Kaylee se redresse doucement et part faire un rapide tour. Ce serait fort étonnant qu'il se soit caché dans l'appartement, mais sait-on jamais. Rapide, efficace, Kaylee fait le tour des pièces de l'appartement et des possibles cachettes. Rien. Enfin, on n'est jamais à l'abri d'un ninja qui s'est réfugié sur une armoire ou dans une pièce fermée de l’intérieur, mais en tout cas tout semble calme. Kaylee retourne donc prés de la victime de l'incident.
- Y'a personne, mais t'en fait pas, je reste là si jamais il à la mauvaise idée de revenir.
Un ton qui se veut protecteur pour dire cette phrase, un léger sourire pour montrer qu'elle est sûr d'elle et qu'elle saura quoi faire si jamais ça devait arriver. Kaylee se baisse à nouveau vers Eleanor et elle regarde un peu plus son bras.
- Je peux regarder ça? C'est à cause du truc cassé à l'entrée? Ça semble léger, mais faut être sûr qu'il n'y est rien dedans et nettoyer.
Kaylee n'est pas infirmière, mais elle a appris les gestes de premier secours. Elle a appris à nettoyer et s'occuper d'une plaie du mieux possible. Si c'est vraiment le truc cassé à l'entrée qui lui a fait cette blessure, il faut s'assurer qu'il n'y est pas de micro débris de verre dans la plaie. Quoi? Ce n'est pas du verre? Peu importe ce que c'est, Kaylee ne s'est pas vraiment attardé sur la matière de l'objet. Elle tend la main vers sa protégée de la soirée pour que ce soit elle qui engage le contact et qui accepte l'aide proposé.
- Tu peux te lever? On va s'occuper de ça.
Avant d'en savoir plus sur la situation générale, Kaylee préfère sonder l'état de la personne en face d'elle. Soigner les blessures physiques et laisser le temps à la personne de se détendre un minimum. Même si elle a fait un rapide tour de l'appartement, Kaylee reste attentive aux bruits alentour. On ne sait jamais. Si l'homme est caché dans un coin, ou s'il était dehors. Peut-être en voyant que c'est une femme qui est venu aider sa cible, il ne se sentira pas en danger et reviendra à la charge en se disant "chouette, deux pour le prix d'une".
(c) Mr.Chaotik
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Jeu 11 Juin - 23:06
role, play, game.
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Les genoux ramenés vers le haut du corps, Eleanor attend sa super-héroïne du soir. Elle ne la connaît pas au point de connaître les moindres détails de sa vie mais qui, après un tel appel, resterait de marbre ? Pas Kaylee en tout cas qui promettait d’être là dans quelques minutes. Presque trop facile finalement. Le premier acte a été mené d’une main de maître. C’est qu’elle passerait presque au stade de reine de la manipulation la Keating. Maîtresse du mensonge. N’importe qui y croirait, en même temps. Personne ne pourrait s’imaginer un tel scénario. Pour jouer la victime choquée jusqu’au bout, Eleanor reste immobile et ignore le conseil de sa proie de se mettre dans un endroit fermé avec pour seule issue une fenêtre. Quel conseil d’ailleurs, on aurait presque dit que la jeune femme avait l’habitude de ce genre de situation tant elle avait réussi à garder son calme au téléphone. Il allait falloir creuser la chose.
Eleanor entend du bruit dans le couloir, elle comprend. Kaylee pénètre dans l’appartement et c’est là que le véritable numéro commence. La propriétaire des lieux constate que la jeune femme venue à sa rescousse n’est pas venue démunie d’arme. Un premier bon point pour en faire une recrue : elle n’a sûrement pas peur de s’en servir. Et elle ne tremble pas. Son calme est olympien, ce qui intrigue d’autant plus Eleanor. Mais l’heure n’est pas aux interrogations, il faut continuer de jouer à la princesse en danger. Eleanor lève les yeux vers Kaylee alors qu’elle se met doucement à sa hauteur. Les yeux rouges, le maquillage qui a coulé, elle est dans un piteux état. Bien différente de la femme séductrice et charnelle avec qui elle avait partagé une nuit quelques jours auparavant. Elle renifle et inspire pour parfaire et appuyer son script qui tournait cette fois à l’improvisation. « Ça va.. je crois. Je ne sais pas. Il m’a suivi alors que je rentrais chez moi… Il m’a poussé dans l’appartement. J’ai hurlé, je me suis défendue comme j’ai pu… » Elle montre les débris du bras entre deux faux hoquets. « Armé, je.. non, je ne crois pas. C’était si rapide. J’ai cru qu’il allait… » Elle ne termine pas sa phrase, montrant simplement le bas de sa robe déchiré. Quelle actrice. Une vraie carrière à Hollywood se profile si elle doit un jour quitter Chicago et changer d’identité. Ce qui pourrait peut-être arriver plus tôt que prévu si les flics viennent fouiller d’un peu trop près dans ses affaires. Mais soit, ce n’est pas le plus préoccupant à l’heure actuelle. Eleanor essuie une larme fictive sur sa joue et hoche la tête en signe de compréhension quand Kaylee lui signale qu’elle la quitte deux secondes le temps de faire le tour de l’appartement.
Personne. Non évidemment qu’il n’y a personne. Il n’y a jamais eu personne. Mais ça, Kaylee l’ignore. Si la harpie avait ne serait-ce qu’un soupçon de bonne conscience, elle stopperait toute cette mascarade mais elle n’est pas animée par l’envie de dire la vérité, encore moins rongée par la culpabilité. Ce sentiment, elle l’a suffisamment expérimenté, suffisamment enduré même. Elle a toujours pensé que c’était de sa faute. Si elle se faisait battre, si elle se faisait insulter. Elle se disait constamment qu’il n’aurait pas été comme ça avec elle si elle avait agi différemment, si elle ne l’avait pas contrarié. En gros, elle l’avait bien cherché. Point barre. Aujourd’hui, cette émotion est ensevelie sous une montagne de rage et de haine qui l’amène à des situations comme celle qu’elle est en train de vivre et de faire vivre à Kaylee.
Pour la blessure, tellement superficielle qu’elle avait complètement oublié qu’elle se l’était infligée. Mais elle se laisse volontiers faire et lorsque Kaylee lui propose de se lever, elle obtempère et lui tend la main. Le contact est chaleureux malgré tout, et rassurant, comme si Eleanor se perdait un peu dans cette histoire montée de toutes pièces. « J’ai une armoire à pharmacie dans la salle de bains ». En tant qu’infirmière, plutôt tout un attirail. Elle aurait pu s’occuper elle-même de sa légère blessure en deux temps trois mouvements mais ça n’aurait pas été crédible, encore une fois. Dans la salle de bains, elle s’assoit sur le rebord de la baignoire et se laisse faire, en s’excusant presque. « Je suis désolée si j’ai gâché ta soirée… J’ai eu tellement peur. Je ne veux pas que ça recommence… » L’acte suivant : susciter la curiosité et la pitié sur son passé trouble et tourmenté.
Kaylee n'imagine pas une seconde que tout ceci n'est qu'une mise en scène. Pourtant des menteurs, des mytho, on en croise souvent. Bien plus souvent qu'on ne le pense. Mais Kaylee laisse toujours une chance aux gens. Surtout aux femmes. Elle est tellement stupide quand il y a une femme devant elle. Plus patiente, plus douce, plus chevaleresque. Dans les mêmes circonstances, si un homme la bouscule sans faire exprès mais ne s'excuse pas directement, elle va sans aucun doute lui faire remarquer avec un ton agressif. Le traiter de tocard même s'il finit par s'excuser. Alors qu'une femme, elle lui fera remarquer aussi, mais plus calmement finissant même par dire que ce n'est pas grave et lui souhaiter une bonne journée avec un sourire niais. Au diable ceux qui disent que les femmes sont le sexe faible. Elles ont un avantage psychologique tellement énorme. Même entre elles. Bon, pour le cas de Kaylee c'est peut-être le fait qu'elle soit fortement sensible aux charmes de ces dames qui la rend presque docile avec certaines. Sa vie a été parsemé de violence, pourtant elle n'aime pas la violence. Surtout celle faite envers les femmes ou les enfants. Aucune femme ne devrait souffrir des mains d'un homme. C'est une chose qui semble lui tenir à cœur.
Eleanor accepte son aide et se laisse diriger jusque dans la salle de bain où elle dit avoir de quoi soigner ça. Une fois dans la pièce, Kaylee ouvre l'armoire en question pour y prendre quelques compresses et un produit désinfectant. Elle humidifie une première compresse pour nettoyer la plaie simplement avec de l'eau dans un premier temps. Il n'y a pas beaucoup de sang, le saignement s'est déjà arrêté tout seul, signe que c'est très léger. Le surplus de sang enlevé, la blonde s'assure quand même qu'il n'y est rien dans la plaie. Kaylee ne respire pas la douceur en temps normal, autant dans sa façon d'être que dans sa façon de parler. Pourtant ce soir elle prouve qu'elle est capable de tout l'inverse. Ses gestes sont très doux et méticuleux. Sa voix est posée et se veut le plus rassurante possible. Eleanor finit par s'excuser d'avoir peut-être caché sa soirée. Elle ne veut pas que ça recommence? elle a déjà vécu ça? Kaylee a bien repéré la cicatrice sur le ventre de la personne devant elle. Ça et la marque sur sa cuisse, mais elle n'avait pas posé de questions. Des marques d'une ancienne agression? Ou plusieurs. Ceci expliquerait cela. Quand elle voit des cicatrices, Kaylee ne pose pas de questions. À moins qu'on pose d'abord des questions sur les siennes. Si les petites cicatrices sur une des jambes de l'ancienne militaire peuvent passer inaperçus, pour celles dans son dos, c'est une autre histoire.
- Si quelqu'un doit être désolé ce soir, c'est pas toi!
Personne ne devrait s'excuser de demander de l'aide. Ni pour avoir été agressé. Elle n'y est pour rien. Demander de l'aide est même une très bonne chose. Pas assez de femmes osent le faire et c'est parfois ce qui leur est fatal.
- T'as eu raison de m'appeler. C'est moi qui devrais être désolé de ne pas avoir été plus rapide.
Pour croiser son agresseur et lui faire payer. Pour lui faire regretter son geste et le dénoncer aux autorités. Kaylee affiche une fois de plus un léger sourire.
- T'inquiète pas pour moi, j’étais bien partie pour regarder des séries pendant des heures en espérant trouver le sommeil.
Kaylee prend une autre compresse et l'imprègne légèrement de désinfectant. Elle attrape doucement le poignet d'Eleanor d'une main, avant de tapoter doucement sur la blessure d'Eleanor avec son autre main. Sans vraiment s'en rendre compte, Kaylee caresse le dos de la main de son interlocutrice avec son pouce. Un geste qui se veut rassurant. Eleanor a déjà pu constater que Kaylee était du genre facilement tactile. Cependant, ce soir Kaylee n'a aucune arrière pensée. Ce geste est simplement là pour lui faire comprendre une fois de plus qu'elle est là pour l'aider et qu'elle n'a rien à craindre d'elle. Même si le contraire n'a surement jamais été pensé.
- Tu connais ce gars? Ou tu l'avait déjà vu quelque part avant?
Après tout, sa dernière phrase laissant croire qu'elle a déjà vécu ça. Peut-être qu'elle a déjà eu affaire à ce gars. Peut-être qu'il s'en est déjà pris à elle, qu'elle n'a rien dit à l'époque et il revient donc à la charge. Comme si cette femme était un jouet déjà acquis qu'on peut reprendre quand l'envie se fait sentir. Ou alors c'est un homme qui a déjà tenté quelque chose avec elle et qu'elle a gentiment refusé son offre. Ce qui rend certains hommes complètement fous. Si elle le connaît ou sait où le trouver, Kaylee pourrait intervenir autrement. Faire en sorte d'aller à la rencontre de ce gars pour lui donner une bonne leçon. Encore une fois, Kaylee n'est pas une grande experte en médecine, mais elle estime qu'il n'y a pas besoin de pansement ou de bandage pour cette blessure. Vaux mieux laisser la peau respirer pour que la cicatrisation se fasse plus facilement. Elle finit donc par lâcher le bras d'Eleanor pour ranger ce qui doit l'être et jeter les compresses utilisées. Une fois de plus, Kaylee tend la main vers la femme assise sur la baignoire. Ce n'est pas l'endroit le plus confortable pour discuter. Eleanor a surement envie de se poser ailleurs. En tout cas, Kaylee ne serait pas contre de son côté. Il y a plus agréable que de rester à moitié accroupie dans une salle de bain, ou assise sur un rebord de baignoire, non?
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