sinners

@billy reynolds

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T’avais pour projet de détruire Billy, de le faire tomber plus bas que terre. Tu voulais le briser. Et tu pensais que c’était le bon moment. Parce que tu sens encore la chaleur et la force de ses mains autour de ton cou. Tu sais que tu auras une preuve, quelque chose contre lui, quelque chose qui pourra le briser. Mais au lieu de ça, il parvient à retourner la situation. Il te retourne le cerveau. Il te parle de ton père, et l’image qu’il dépeint de lui ne te plait guère. Ça te fait même partir en vrille. Parce qu’il arrive à te retourner le cerveau. C’est un psy, tu as eu tendance à trop l’oublier, le cerveau humain il le connait parfaitement. Même si t’as été capable de le tromper pendant très longtemps, il sait très bien lui comment te manipuler et comment te faire plier. Il sait que ton père, c’est ton unique faiblesse. Et tu plonges, en chute libre. Ce n’est pas lui qui tombe plus bas que terre, c’est toi. T’as perdu. Il a gagné. Et te voilà. T’es en larmes, effondrée au sol. Ton corps secoué par les sanglots. Alors que tu te refais le film de ta vie. Ta vie misérable. T’en viens à te dire que tu n’aurais jamais dû voir le jour. Parce que dès lors que tu es arrivée sur cette terre, tout est parti en vrille. Ta mère est morte, ton père a dû t’élever alors que lui, il voulait sauver sa femme, son amour, la seule qui n’ait jamais compté pour lui. Et toi tu t’es accrochée à ton père, t’as cherché son amour de longues années avant qu’il n’accepte de t’aimer en retour, qu’il mette de côté la rage et la rancœur qu’il avait contre toi pour lui avoir arraché sa femme. Il t’a donné tout l’amour qu’il avait en lui, jamais tu ne l’as vu comme un monstre. Même quand tu as appris tout ce qu’il avait fait. Tu as fait l’autruche, tu refusais de voir la vérité en face. Tu préférais t’imaginer que ton père n’était que cet homme bien, cet homme doux et ce bon père. Tu as refusé d’admettre qu’il était dangereux, qu’il avait fait du mal à beaucoup de gens. Et là Billy te balance toute cette évidence en plein visage. Tu prends conscience que tu t’es attaquée à la mauvaise personne. C’est pas Billy le responsable de tout ce qui t’est arrivé, c’est toi-même.

Tu ne le vois pas, ton visage toujours enfoui contre tes genoux, mais tu l’entends bouger, tu l’entends approcher. Tu penses qu’il va profiter de la situation pour se jeter sur toi et te mettre hors d’état de nuire. Tu en viens même à souhaiter qu’il te tue sur le champ. Ce serait tellement plus simple pour tout le monde. Tu serais enfin libérée de ce lourd fardeau qu’est ta vie, ton existence même. Mais au lieu de ça, il essaye de presque te rassurer. Tu relèves doucement la tête, ton visage baigné de larmes, les traits tirés, la douleur qui se lit sur ton visage et la fatigue surtout. La fatigue d’une vie qui n’a été motivée que par une vengeance qui n’avait pas lieu d’être. Tu croises son regard bleu, et tu te sens presque coupable de t’en être prise à lui. Parce qu’il est là à essayer de te faire prendre conscience que ce n’est pas de ta faute à toi, que tu te trompes à nouveau de cible. Mais cette fois, il ne te fera pas changer d’avis, tu sais que c’est toi le monstre. C’est en naissant que ton père a laissé ses plus bas instincts se réveiller. « Il aurait mieux valu que je ne vienne pas au monde. Toutes ces femmes seraient sûrement encore en vie, mes parents seraient encore en vie et heureux. Et je n’aurais jamais fait de mal à ta famille…» Tu te sens coupable. Coupable de tout ce qui leur est arrivé à tous, et de ce qui t’est arrivé aussi. « J’ai mérité tout ce qui m’est arrivé. Et je ne mérite pas de vivre… et d’être heureuse.» Ce que tu n’as jamais vraiment été en fait. Tu pensais que tu serais heureuse une fois que tu aurais vengé ton père, mais même ça tu ne vas pas y arriver. Ton estime pour toi est en train de chuter, tu n’arrives même plus à avoir la moindre considération pour ta propre personne. En fait, tu te dégoûtes même.

Avec difficulté, tu te redresses. Tu grimaces parce que tu ne t’es pas ratée en te cognant contre le meuble. « Je suis désolée. Mais je te jure que j’aurais jamais fait de mal à Andrew, jamais je ferais du mal à un innocent. C’est un chouette gamin, bats-toi pour lui. Il le mérite… » Qu’il se batte pour ne pas perdre totalement la garde son fils, parce qu’il aura besoin d’un père et d’une mère qui l’aiment. Tu sais que trop bien ce que ça fait de perdre un parent, t’as perdu les deux toi. Tu dois te tenir un peu au meuble pour ne pas tomber, tu te sens vraiment mal, nauséeuse, faible. Alors c’est d’un pas lent que tu te diriges vers la porte du salon. Tu te retournes une fois que tu es prête à en sortir. « Je dirai à Mandy que je me suis sentie mal et que tu es venu pour t’occuper d’Andrew. Encore pardon. Tu ne me reverras plus. Promis. » Que tu souffles d’une voix tremblante avant de te diriger vers la porte d’entrée. Tu l’ouvres et tu t’échappes de cette maison dans laquelle tu as passé bien plus de temps que tu ne l’aurais dû. Tu t’enfuis, tu ne feras plus jamais contre cette famille. Tu ne feras plus jamais rien contre qui que ce soit. La seule personne à qui tu as envie de faire du mal à présent, c’est toi-même. Parce que tu le mérites. Tu es une erreur de la nature, tu n’aurais jamais dû avoir la chance de fouler cette terre. Et tu ne comptes pas y rester encore très longtemps. Tu rendras un grand service à tout le monde en disparaissant. Ce sera sûrement la seule chose bien que tu auras faite dans ta misérable vie.

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